En pièces est un spectacle itinérant, qui s’interroge sur la féminité et sur ses représentations. Dans les différentes pièces d’une maison, cinq jeunes femmes jouent avec des images galvaudées, qui donnent tour à tour à la femme des attributs d’icône (épousée au plus beau jour de leur vie, femme fermant les yeux, mère dévouée…) ou de monstre (sorcière, harpie) et traquent ainsi toute déviance vis-à-vis d’un modèle que l’on appelle féminité. Le recours au bestiaire (chienne, jument, chouette, vipère, chatte, girafe, poule, vache, pieuvre, pie, etc.) est, dans ce sens-là, assez significatif. Si tous (et par conséquent, une majorité de femmes) voudraient croire en une féminité innée et naturelle (la peau douce, l’absence de poil, la fragilité, la tendresse, l’émotion, etc.), les pratiques visant à atteindre ce modèle témoignent d’une construction, à la fois mouvante – selon les critères de beauté physique notamment, changeant avec les époques – et bien ancrée. Aussi, malgré les progrès en matière de partage des tâches domestiques, c’est bien la maison qui nous est apparue comme le milieu « naturel » de la féminité. Milieu contraint, où femme se plie à la norme, se révolte, imagine… Milieu peuplé de tous ces fantasmes, du rêve de perfection à l’envie de tout envoyer valser.
En pièces investit un appartement, et agit in situ, renouvelant à chaque fois la composition du spectacle, selon la disposition des pièces, et transformant le décor réel, véritable, lié à une autre histoire, en foyer d’étrangeté. Une certaine mise à distance du quotidien, par des éclairages colorés, la musique originale et les chansons live ponctuant régulièrement le spectacle, mais aussi par des scènes qui mettent en situation des images, des désirs, plutôt que des tranches de vie, nous permet d’ouvrir une autre porte, celle qui, derrière la façade bien lisse de l’idéal féminité, nous ouvre le monde fantasmatique des démons qu’il a engendré.
Texte, interprétation et mise en scène : Élise Boch, Noémie Fargier, Axelle Grégoire, Lara Khattabi, Lucie Pannetrat // Création sonore et musicale : Vincent Levesque // Chansons : Les Pet’cordes (Vincent Levesque et Lucie Pannetrat) // Costumes : Axelle Grégoire et Lucie Pannetrat // Vidéo : Noémie Fargier // Production : No panic compagnie // Le spectacle a été joué 12 fois chez des particuliers, sur leur invitation, et 3 dates au Bœuf 3 (squat artistique), de juin à septembre 2008
No panic compagnie 